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Intervention de l'Afcan au colloque ISPS de Nantes le 24 Juin 2005


L'élément humain dans la sûreté

Le capitaine du navire – son rôle


  1. La prise de conscience des équipages


  2. La deuxième chose qu'a du faire le capitaine de navire, la première étant de lire le code ISPS, fut de faire prendre conscience à son équipage de l'importance de ce code.
    Car tout d'abord c'était encore un nouveau code, et il ne faut pas oublier que l'on venait juste d'ingurgiter le code ISM avec toutes les contraintes qu'il contient.
    D'ailleurs la première réaction a été de dire "encore un code à lire, encore des nouvelles procédures à apprendre et à appliquer, encore des modifications à apporter sur l'organisation du travail, encore des installations ou des travaux en plus. Mais où va-t-on s'arrêter ?"

    Certes, les personnes à bord avaient déjà conscience des dangers, surtout liés à la piraterie et aux clandestins. Mais il restait encore du chemin à faire pour les autres dangers évoqués par le code, tel le terrorisme. De plus, alors qu'à la lecture du titre du code qui concerne les navires mais aussi les installations portuaires, une grande nouveauté, la lecture proprement dite du code apportait quand même un gros doute sur sa partie portuaire. Pourquoi après avoir lu le code pouvait-on penser que les navires étaient une fois de plus les seuls à être concernés ? La partie A, la seule obligatoire jusqu'à maintenant, parle beaucoup plus du navire que du port. Elle exige surtout une vérification / certification du navire, mais pas du port. Cela, les rares membres d'équipage qui avaient eu la curiosité de lire le code s'en étaient aperçus. L'acceptation du code en eut que plus de difficulté pour eux, mais aussi pour les membres d'équipage qui n'avaient pas lu le code, et entendaient les autres le critiquer. Et ceci bien avant son application.
Il a donc fallu faire admettre aux équipages le bien-fondé du code, pour le navire mais aussi pour le port.
Enfin la prise de conscience des équipages a été plus ou moins rapide en fonction de l'historique de la compagnie de navigation, ainsi que l'historique de chacun à bord, et du capitaine.

La première mesure a donc été de réunir l'équipage et de lui expliquer en quoi ce code était important et ce qu'il pouvait empêcher s'il était bien appliqué.

  1. La formation des équipages


  2. Faire prendre conscience à des marins ou leur faire peur, ce n'est déjà pas facile. Mais les former pour qu'ils répondent positivement à un code que presque personne n'a lu, c'est plus difficile.
    Il a d'abord fallu trouver de quoi on allait leur parler, car pour un marin il faut qu'un exercice, un entraînement, soit vivant, physique, palpable; il ne fallait surtout pas rester dans des considérations philosophiques sur la sûreté.

    Le marin de base aime savoir ce qu'il faut faire en cas de....
    C'est ce qu'il apprend pour toute sa vie à bord, il sait comment faire pour trouver sa route et sa position, il sait trouver et réparer une panne, il sait ce qu'il faut faire pour éteindre un feu, pour d'autres situations d'urgence, et pour abandonner son navire.
    Mais il ne comprend pas qu'une personne s'approchant du bord, suivant son attitude, son apparence, sa vitesse d'approche et autres signes, puisse ou ne puisse pas être un danger potentiel.
    Alors, déterminer le risque de danger suivant les intentions de la personne en question, le marin, lui, ne sait pas faire.
    Depuis l'avènement des règlements Solas et autres, et encore plus depuis l'ISM code, le marin à bord sait ce qu'est un exercice, de tout genre.
    On lui explique ce qu'il doit faire, où il doit aller, etc..
    Donc pour l'ISPS il a fallu arranger le code et les procédures SSP des compagnies pour qu'il comprenne qu'il pouvait faire vraiment quelque chose.

    Pour exemples, je prendrai 2 thèmes d'exercice: la recherche à bord du navire au départ du port et la vérification des visiteurs en escale.

    • Pour la recherche dans le navire, on pouvait alors employer des mots que le marin connaît: parler de locaux, d'équipe de recherche, de ce qu'il fallait regarder et trouver, de ce qu'il fallait faire et ne pas faire en cas de découverte; dans ce cas on peut faire un vrai exercice, qui va prendre du temps, où les gens vont avoir à bouger et à remplir un rôle. Certains commandants vont même jusqu'à cacher colis suspects et fausses bombes pour donner un air de réalisme à l'exercice. Et cela, même si l'exercice est pris peut-être de façon moins sérieuse que nécessaire, apporte beaucoup au marin. Il a vraiment eu l'impression de faire quelque chose d'utile, surtout si tous les colis cachés n'ont pas été découverts. Car il a alors un doute sur sa manière de regarder à bord et il va automatiquement et inconsciemment évoluer vers plus de sûreté.
    • Pour la vérification des visiteurs en escale, l'entraînement ne concerne pas tout l'équipage, mais il est plus dur que le précédent et il est quand même nécessaire que tout l'équipage y participe. Il faut arriver à faire parler en anglais et assez fort quelqu'un dont ce n'est pas la langue première et qu'il ne possède pas toujours bien, pour s'adresser non pas à des collègues mais à des étrangers qui eux aussi, suivant les ports, sont parfois du même niveau en anglais. Leur demander leur identité, le but de leur visite, les comprendre, les diriger, les accompagner ou leur demander d'attendre, ce n'est pas une chose facile pour la personne de quart à la coupée – dont faut-il le rappeler ce n'est pas le métier premier.
      Car évidemment il a fallu trouver la personne adéquate et donc surtout disponible pour remplir ce poste. Et là, pour un vrai entraînement, le Commandant doit être présent. Il est la personne à bord qui a autorité sur les autres, qui ressemblerait le plus à un visiteur terrien. A défaut le SSO qui est souvent le Second Capitaine peut très bien faire répéter des situations aux gardiens de coupée, devant tout le reste de l'équipage : ils doivent arrêter le "visiteur" et lui demander ses papiers fermement mais poliment, et surtout à voix haute, claire et intelligible. Et si le résultat immédiat n'est pas évident, cela aide à combattre la timidité presque maladive de certains à oser parler anglais fort, même pour souhaiter la bienvenue. Le résultat final au jour de l'escale est profitable à tous, au bord comme aux visiteurs.

  3. La mise en application du code – les problèmes techniques à résoudre


    Il a fallu aussi se pencher sur certains problèmes techniques à résoudre, certes en accord avec les services "technique et qualité" des compagnies. Ces problèmes ont été d'ordres divers: installation du "Ship Security Alert System", étude de la fermeture des portes étanches tout en les maintenant facilement ouvrables de l'intérieur, sécurité oblige, détermination des locaux devant être condamnés en escale et qui peut en avoir la "clef", blocage de certaines échelles extérieures, fermeture et condamnation des ouvertures sur le pont pouvant servir de cachettes à des terroristes.
Ceci, tout en gardant à l'esprit la sécurité du navire et de l'équipage. Fermer les portes étanches d'accès aux emménagements peut être une fausse bonne idée.
Certes il faut penser à la non-intrusion d'éléments non-désirés dans les emménagements mais il ne faut pas oublier que l'équipage peut avoir besoin de sortir ou d'entrer rapidement, et qu'il lui faut donc pouvoir le faire sans avoir à tourner en rond un certain temps avant de trouver la bonne porte.
D'ailleurs à mon avis le débat n'est pas encore clos: on s'aperçoit que le local sécurité des emménagements est d'un accès interdit par l'extérieur. Mais n'est ce pas en contradiction avec la sécurité si d'aventure, des pompiers montant à bord n'étaient en mesure de pouvoir pénétrer dans ce local suffisamment rapidement pour éviter une catastrophe à l'équipage.
Donc il y a encore du travail de réflexion et d'arrangements à trouver et à faire.

Tout ceci de l'idée à la vérification en passant par la conception et la réalisation, dépend de l'autorité du commandant du navire.

  1. La mise en application du code – organisation du travail au port


  2. L'organisation du travail pendant les escales a du être revue profondément. On rajoutait subitement un rôle important à la coupée.
    Il y a toujours eu du personnel à la coupée ou pas loin, je pense particulièrement aux navires de vrac liquide qui ont toujours une personne de quart aux manifolds de chargement, mais la plupart du temps cette personne avait deux fonctions: elle était de quart sécurité aux manifolds, à la surveillance du chargement/déchargement, et avec un regard de temps à autre sur la coupée. C'est souvent vers elle que venaient les visiteurs pour se faire connaître et demander leur chemin.
    Il fallait que maintenant cette personne soit employée à temps complet à son nouveau rôle de gardien, donc au détriment de la surveillance cargaison, ce qui bien sûr, ne pouvait pas se concevoir.
    Il a donc fallu ajouter une personne de quart à la coupée. Les équipages étant ce qu'ils sont, il était hors de question de prendre un membre de l'équipe pont, qui sur la plupart des navires fonctionne déjà en quart 6/6. On ne pouvait pas non plus bloquer un officier à la coupée pendant 4 ou 6 heures.
    Sur la plupart des navires, on s'est donc rabattu sur le personnel machine. C'était la solution qui posait le moins de problèmes étant donné que dans la grande majorité des ports, l'entretien mécanique est interdit pour pouvoir en permanence être capable d'appareiller en cas d'alerte sécurité. On a donc mis un ouvrier mécanicien de quart à la coupée. C'est aussi pour cela que l'entraînement de ce personnel, nouveau sur le pont, est long, dur et assez fastidieux.
    Enfin cela a été possible sur les navires où il y avait encore du personnel "libre" lors des escales. Et il a aussi et surtout fallu faire admettre aux chefs mécaniciens qu'on leur supprimait 2 hommes pendant les escales, pendant toutes les escales, et pendant toute la durée de l'escale. Vous pouvez imaginer que cela ne s'est pas fait tout seul. Il existe encore aujourd'hui pas mal de chefs mécaniciens pour se plaindre de ce fait.

  3. Les relations portuaires


  4. Les relations portuaires avant l'arrivée au port sont bien sûr du ressort du capitaine, puisque c'est lui qui prépare ou tout au moins s'assure de la préparation des papiers portuaires pour les services d'immigration de douane, de santé. Et c'est aussi lui qui maintenant les envoie en avance, car ils le sont de plus en plus demandés. Enfin c'est toujours le capitaine qui doit aller à la rencontre des autorités lorsqu'elles montent à bord pour les clearances diverses.
    Parmi les papiers échangés avec la plupart des ports et qui concerne l'ISPS, on trouve:
    • à partir du bord, la liste d'équipage, la liste des 5, 10 ou 20 ports précédents avec le niveau de sûreté appliqué, des informations sur les actions entreprises concernant la sûreté, ainsi que les dates de certification, et des confirmations que tout va bien être mis en oeuvre pour l'ISPS par le navire.
      A noter que les mêmes informations doivent être envoyées d'abord par e-mail, puis données aussi sur place, à l'arrivée. Il faut aussi pour certain pays, les USA, envoyer ces données plusieurs fois si il y a correction(s) à appliquer à la Notice Of Arrival, et il y en a toujours car les données portuaires ne sont pas toutes connues longtemps à l'avance. Parfois elles restent même inconnues jusqu'à la veille de l'arrivée.
    • à partir de la terre, les informations sont bien plus réduites. En premier lieu je dois constater que jusqu'à présent aucun port ne m'a envoyé sa date de certification, je n'ose demander pourquoi. Autant pour certains ports il est relativement facile d'obtenir avant l'arrivée une liste du personnel devant monter à bord, autant pour d'autres ports cette liste ne peut tout simplement pas être faite car pour la plupart des postes, les personnes s'appellent TBN, ceci certainement pour des raisons évidentes de programmation et de disponibilité de personnel. A noter tout de même que dans la plupart des ports, les contacts PFSO sont fournis par l'agent avant l'arrivée, et de plus en plus sans attendre la demande du bord.
    Il est tout de même préférable que ce soit le bord qui fournisse la liste des personnes attendues ou tout au moins leur fonction et compagnie pour qu'un semblant de liste soit donné aux autorités du terminal. Même si dans encore beaucoup trop de ports on peut voir arriver à bord des personnes non prévues, sans être prévenu de leurs arrivée. Ce qui dans l'esprit du commandant de navire aurait tendance à prouver que si le bord doit être bien certifié, le port peut lui continuer à ressembler à une passoire.

    Ceci dit, certains ports ou terminaux appliquent efficacement le code. Il est vrai que les ports vraiment fermés ne concernent que les terminaux à marchandises dangereuses, qui étaient déjà fermés et surtout déjà policés à l'entrée pour la plupart. Ce qui fait que pour de tels ports il n'y a eu pas grande modification de statut et de façon de faire.
    Certains terminaux ont même instauré la présence d'une personne supplémentaire à bord pendant l'escale: le PFSO ou son représentant. Voilà une personne utile à bord: il est la 2ème personne à monter – après le pilote évidement – mais surtout il est capable de présenter chaque arrivant/visiteur en donnant son nom, sa fonction son rôle. En même temps que le SSO, il s'assure que le visitor log book est bien rempli à l'arrivée mais aussi au départ du visiteur. Et cela même pour les autorités de douanes, immigration, santé et autres.
    Car d'une manière générale, il y a encore toujours des difficultés avec certains visiteurs. Une majorité encore trop grosse d'officiels se pense au-dessus des lois, tout au moins de celle-là et refuse de décliner son identité. Ne parlons pas de la prouver; la seule vue de leur uniforme kaki devrait suffire à imposer le respect et surtout ne pas permettre d'oser embêter ces messieurs avec un code dont ils n'ont que faire si ce n'est de vous le reprocher lorsque vous l'appliquez et de vous le faire remarquer si vous ne l'appliquez que moyennement avec eux.
Ceci est aussi valable avec le personnel du terminal ou le représentant de l'affréteur qui certes ont déjà peut-être dû prouver leur identité à l'entrée du terminal, mais ce dont nous ne sommes pas au courant à bord. Et quand bien même le serions-nous, nous sommes dans l'obligation, du fait du code, de re-vérifier leur identité à leur arrivée à bord. Et ne parlons pas de la fouille des bagages. Pour cela, il existe une seule méthode: les faire ouvrir sur le pont à l'arrivée du visiteur. Déjà il n'est pas très facile, on peut en convenir, pour un ouvrier mécanicien de demander à un visiteur ses papiers, mais alors lui demander d'ouvrir son sac pour jeter un coup d'oeil dedans, voire le fouiller, alors que la demande d'identité est considérée par certains comme une atteinte à la liberté individuelle !
Quant à faire une détection métallique sur un visiteur, c'est physiquement impossible. Les navires ne sont plus construits en bois depuis quelque temps déjà, et en plus les détecteurs de métaux ne sont pas construits avec sécurité intrinsèque et ne peuvent donc pas de ce fait être utilisés sur le pont d'un navire à marchandises dangereuses. La détection ne pourrait se faire qu'une fois dans les emménagements, ce qui en cas d'homme-bombe n'est pas vraiment le but recherché semble-t-il.

Enfin il y a le cas des pays qui interdisent ou essaient d'interdire la sortie à terre des membres d'équipage. On a la nette impression que dans la grande majorité des pays et des ports l'application du code ISPS s'est traduit par le fait que le danger ne pouvait venir que par la mer, donc par le navire. De là à considérer que le terroriste potentiel était l'équipage du navire, il n'y a eu qu'un petit pas qui a été très vite franchi par certains.
Et pourtant l'expérience a montré l'inverse, la victime étant le navire et l'attaque a subie à partir de la terre, même si elle ne venait pas exactement du terminal dans lequel se rendait ce navire.

Que les ports seraient plus sûrs sans les navires ! Encore qu'on peut avoir un doute, il y a plus de camions que de navires à entrer dans un port. Et puis sans les navires les ports auraient-ils besoin d'exister ?

  1. Avantages et inconvénients du code et de sa mise en application


  2. De tout ce qui vient d'être dit, la première conclusion et constatation est que malgré son intitulé ISPS (ship and port facility), les bords ont eu la nette impression que seuls les navires étaient vraiment astreints à l'application du code; il est vrai aussi qu'il est certainement plus facile de l'appliquer et de l'organiser sur un navire que dans un port.
    Comme inconvénients de l'application de l'ISPS, il y a le travail supplémentaire que cela a donné aux équipages pour l'installation du matériel; le temps passé en formation supplémentaire, (formation pas toujours bien comprise sur la connaissance de nouveaux textes et leur application à bord); la préparation et la modification de l'organisation de travail pendant les escales.
Il y a aussi la routine qui peut s'installer. A ma dernière visite dans un port européen, nous avons eu à enregistrer 85 entrées sur le visitor log book , et donc 85 sorties du bord. Sur 2 jours et demi, c'est beaucoup. Et bien sûr certaines personnes plusieurs fois. Le vrai danger est peut-être là: on voit et on vérifie une personne une fois, 2 fois, 3 fois et puis on sait qui il est, ce qu'il vient faire normalement et la routine aidant on ne le vérifie plus comme avant. On marque bien sur son heure d'entrée et de sortie, mais on ne vérifie pas obligatoirement ce qu'il transporte. A la 6ème entrée à bord cette personne s'est peut-être transformée en dangereux terroriste. Mais le code ISPS a aussi apporté et devrait en apporter encore des avantages aux navires: lorsque l'on connaîtra à l'avance toutes les personnes qui doivent venir, on pourra travailler sans trop de surprises, être prêt à recevoir les visiteurs : tout le matériel et la documentation qu'ils demanderont seront prêts à leur arrivée.
Et je pense tout particulièrement aux inspecteurs PSC qui ne se font pas annoncer à l'avance par l'agent, qui ne sont donc pas prévus et par conséquent pas listés sur la feuille donnée au gardien de coupée.

Je terminerai par 3 faits réels, dans 3 ports différents, qui me sont arrivés lors de mon dernier embarquement. Ils démontrent à eux seuls deux choses: d'abord comment la plupart des administrations ont perçu le code, à savoir que le danger c'était la mer et donc le marin, ensuite ce qu'il peut apporter d'extraordinairement bon aux navires lorsqu'il est appliqué par les ports et terminaux.

Dans le premier cas, nous arrivions à LOOP (Louisiana Offshore Oil Port) situé à 18 milles de la côte. Pour information nous avions chargé sur une bouée à Djeno – Congo et une autre bouée à Kizomba – Angola située elle à quelques 80 milles de la côte. Nous avions aussi effectué un premier allègement à SW Pass, approximativement à 40 milles de la côte. En arrivant à Loop, nous fûmes dirigés au mouillage, avec consigne d'attendre que les Coast Guards américains viennent d'abord donner clearance au navire pour s'amarrer. Il ne s'agissait que d'une inspection ISPS, dénommée HIV (pour High Inspection Vessel). Nous avons attendu une journée entière, étant arrivés vers midi au mouillage et ayant l'inspection le lendemain à 10 heures. Une équipe de 4 US coast guards est venue à bord, a demandé que tout l'équipage (sauf 1 à la passerelle et 1 à la machine) soit réuni dans une seule pièce, avec les passeports. Un des US coast guards a regardé tous les passeports avec la personne en face de lui. Deux autres se sont promenés d'abord sur le pont, ont demandé à faire ouvrir les magasins qui étaient fermés pour cause d'ISPS, afin de les inspecter. Ils ont ensuite visité la machine, la passerelle, les emménagements y compris toutes les cabines. Le 4ème était le chef et supervisait le tout. Au bout de deux heures, ils sont partis, donnant une heure de clearance pour manoeuvrer, ne laissant aucun papier, n'ayant posé aucune question (alors qu'avec le second capitaine/SSO nous nous étions préparés à subir un audit en règle avec plein de questions pièges – mais un peu de révision ne fait pas de mal). Tout de suite après nous avons pu manoeuvrer vers la bouée de déchargement. Bien entendu aucune activité de toute sorte n'était autorisée, même si nous aurions été bien contents de recevoir les vivres. Le résultat a été une journée de perdue commercialement, et surtout l'impression d'une suspicion envers l'équipage.

Le 2ème cas, je l'ai vécu en débarquant au mouillage pour soutage à St Eustatius – Antilles Néerlandaises. L'agent est venu nous chercher avec une vedette de plaisance. Nous avons mis pied à terre à une espèce de môle pour plaisanciers/pêcheurs, en ville. Puis nous fûmes dirigés vers un hôtel. Le lendemain, comme nous avions 2 jours complets d'attente avant l'avion, mes promenades m'ont entre autre dirigé vers le port. Port qui reçoit quelques petits pêcheurs, un genre de ferry pour les marchandises diverses, et surtout des touristes, principalement américains. Eh bien pour entrer dans le port, pour passer la barrière, il me suffisait de débourser 2 dollars américains. Ayant noué contact avec une entreprise de plongée pour touristes, je me suis fait expliquer le pourquoi de ce péage. La raison est que la barrière a été mise sur demande des autorités américaines, afin d'être conforme au code ISPS, sous peine de l'arrêt de la venue des touristes américains. Le port a cru bon de rajouter un « péage » symbolique de 2 dollars pour tous les entrants/sortants du port.

Le 3ème cas se passe dans un certain port de la mer du Nord : Rotterdam. Avant l'application du code ISPS, lorsque l'on arrivait à quai, on pouvait avoir à bord avant la fin de la manoeuvre d'accostage: la coupée de terre installée; du personnel du terminal déjà occupé au branchement des manifolds de cargaison; une barge de soutage occupée du coté opposé au quai à s'amarrer sur le navire, sans l'aide de membres d'équipage; idem pour la barge d'huile, avec bien sur des gens de ces barges déjà sur le pont (ils montaient par des échelles à partir des barges); la barge avec les provisions et les rechanges en train de corner désespérément à l'arrière pour que l'on s'occupe d'elle; les représentants des affréteurs et les inspecteurs cargaison demandant à parler en urgence au second capitaine, juste pour obtenir une photocopie du connaissement; et même, je l'ai vu, des techniciens commençant à promener des extincteurs à bord pour leur visite annuelle. Le tout alors que l'équipage était au poste de manoeuvre pour encore presque 1 heure.
Maintenant, ces personnes ne peuvent pas monter à bord, la mise en place de la coupée est refusée et repoussée à la fin de la manoeuvre lorsque du personnel de bord sera disponible pour vérifier l'identité des visiteurs.

Rien que pour l'extrême tension, pour ne pas dire plus, qui régnait à ce moment là à bord et qui a disparu, je dis merci au code ISPS.

Et je souhaite que partout on en arrive à cela.

Cdt H. Ardillon


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