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L'analyse des risques dans l'industrie maritime
et son interconnexion avec le code ISM

page du code ISM Nº24
 
  1. Obligation du DUP (Document Unique de Prévention)
  2.        Comme précédemment évoqué (voir la page du code ISM N°21), en France, une Directive Européenne de 89 (introduite en droit interne en 91) avait été complètement oubliée par la Direction des Affaires Maritimes de l'époque ou alors, ne riez pas, on avait décidé qu'elle s'appliquait seulement à l'industrie tout court mais pas à l'industrie maritime! Incroyable mais vrai …. La DAM ne pouvait ignorer cette obligation… ou alors peut-être que les marins étaient considérés comme inaptes à comprendre cela!
    Il a fallu d'abord un décret 2001-1016 du ministère de l'emploi et un amendement au code du travail en parallèle, qui s'est traduit par une instruction de la DAM (2006-001) le 19 Septembre 2006 relative à la mise en œuvre du DUP dans les entreprises d'armement maritime pour que cette obligation nous tombe dessus! La prise en compte de l'obligation du DUP (Document Unique de Prévention) n'est donc effective que depuis 2007 soit…15 ans après la date limite (92)!

    1. Application de l'instruction 2006-001

    2. Ce document, signé Michel AYMERIC, est vraiment intéressant. Le rappel de l'obligation du DUP dans notre industrie, particulièrement à risques, est un modèle de diplomatie ; on ne dit pas qu'on est très en retard et on ne dit pas plus qui est responsable de ce retard! et, on met la pédale douce sur les armateurs tout en rappelant que le DUP est de leur responsabilité et que des sanctions pénales importantes sont prévues dans les articles 223-1 et 221-6 du N C P (Nouveau Code Pénal)!

             Pédale douce peut-être mais « gros bâton » caché derrière le dos quand même ! Ce texte rappelle aussi, rapidement, une vieille obligation de désignation d'un membre d'équipage chargé de la prévention des accidents (décret 77-80). Ce texte a été abrogé depuis par le décret 2007-1227 « Art. 6. - Tout armateur désigne, sur chacun de ses navires, un membre de l'équipage qualifié et chargé, sous l'autorité du capitaine, de la prévention des risques professionnels ».
      Sur les navires français, la tradition veut que ce « membre d'équipage » soit le second capitaine lorsque cela est possible (c'est à dire sauf équipage restreint). Cependant cette désignation doit être effective et on peut aisément s'en conformer en l'introduisant par exemple dans la description des tâches du Second Capitaine dans le SMS.

    3. Oui la pédale douce!

    4. En effet, l'absence ou l'insuffisance du DUP (style copié/ collé très en vogue aujourd'hui par exemple!) constatée au cours d'une visite de sécurité n'empêche pas la délivrance des titres de sécurité… c'est pourtant une non-conformité majeure! …comprenne qui pourra! et… il restera à l'inspecteur du travail de donner des suites (conseils, observations ou PV!)
      En cas de PV et, évidemment ,en cas d'accident important : quelles seront les conséquences ?

      Pour Info
    5. Article 221-6 du Nouveau Code Pénal (Modifié par Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 - art. 3 (V) JORF 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002)

« Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, la mort d'autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende.
En cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75000 euros d'amende ».
      Ah …quand même… comme dirait BIGARD! Et qui est concerné? …Il s'agit semble-t-il des Capitaines, DPA et membre de l'équipage chargé de la prévention des risques (?) et autres directeurs engagés dans la sécurité du navire ou de ses opérations! … Dur dur!

    1. Et encore : Article 221-7
« Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, de l'infraction définie à l'article 221-6. Les peines encourues par les personnes morales sont :
  1. L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
  2. Les peines mentionnées aux 2°, 3°, 8° et 9° de l'article 131-39 ».
      Etc…De qui s'agit-il ? Il peut s'agir ici de la Compagnie ! …du marchand d'hommes et/ou sous-traitant !

    1. Sanctions pénales :
    2. Article 121-3 du code pénal cité plus haut !
  • « Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre.
  • Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d'autrui.
  • Il y a également délit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait.
    Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer.
  • Il n'y a point de contravention en cas de force majeure »
    1. En conclusion


       Quand tout va bien qu'il n'y a pas d'accident, tout ce blablabla est lu rapidement… le coup de l'autruche la tête dans le sable quoi! Au lendemain de l'accident, ce n'est plus pareil, aujourd'hui comme hier, les parapluies sortent et gare à celui qui rêvait ! Un bon avocat en face de vous, un tribunal moyen et vous vous retrouvez en culotte courte !
Si les Capitaines de navires, les officiers sécurité, les Capitaines d'armement connaissent bien l'étendue de leurs responsabilités, ce n'est pas toujours le cas des personnes désignées. La jurisprudence est surtout anglo-saxonne (US et UK) où les responsables condamnés ne sont pas systématiquement les capitaines comme chez nous.
La tendance actuelle de faire élire un délégué à la sécurité pour tenter de contre balancer un éventuel abus de pouvoir ou erreur grossière de l'État-major, ne sera pas sans conséquences sur les responsabilités normales du membre d'équipage élu car, ref Art 48-III du décret 96-859, « Il incombe à chaque membre de l'équipage de prendre soin, selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que celles des autres marins ou passagers concernés par ses actes ou ses omissions au travail, conformément à sa formation et aux instructions du capitaine »

       Mme GIBERTIE du bureau de l'action sociale, de l'hygiène et de la santé des gens de mer de notre ministère, dans « Démarche d'évaluation et de prévention des risques professionnels et application du code ISM à bord des navires », nous rappelle que les délégués de bord sur les navires français ne sont pas là uniquement pour les revendications de confort mais qu'ils « peuvent présenter toutes réclamations à l'employeur s'agissant de la protection des marins, d'hygiène et de sécurité à bord ».

       Nous avons donc déjà nos délégués à la sécurité voulus par l'ITF !… mais sont-ils suffisamment formés pour analyser des dysfonctionnements, pour participer aux enquêtes en cas d'accident et surtout sont-ils prêts à assumer leurs manquements dans ces nouvelles responsabilités ?
Je pose la question.

  1. Programme d'Hygiène et de Sécurité au travail à bord des navires et son interconnexion avec le code ISM

  2. Tandis que les français se mettent tardivement à jour de la réglementation Européenne en exigeant le DUP, l'OMI et son groupe de travail sur le facteur humain, nous ont élaboré une circulaire (MSC-MEPC.2/Circ.3) donnant des «directives sur les éléments fondamentaux d'un programme d'hygiène et de sécurité du travail à bord des navires» !

    De quoi s'agit-il et comment l'intégrer dans mon SMS ?
    1. Encore appelé SOHSP (Shipboard Occupational Health and Safety Programme), il consiste à déterminer et mettre en œuvre au sein d'une compagnie, son personnel et ses navires, une politique de protection du personnel dans le cadre de ses tâches tant à terre qu'à bord.
    2. A première vue il s'agit là aussi de gestion des risques hygiène et sécurité dans le travail c'est à dire identification, évaluation, tentatives de maîtrise des risques, enquêtes et traçabilité, retour d'expérience et amélioration continue. On rejoint donc complètement le DUP.

    Est-ce d'un double emploi avec le DUP ?
    1. Oui et non, c'est à dire que le programme contient le DUP limité aux risques professionnels et
    2. Que le SOHSP va beaucoup plus loin dans le management des risques.

    Comment intégrer le SOHSP dans le SMS ?
    1. Avant que notre Administration ne rende le DUP obligatoire, nous avions l'habitude de créer dans le SMS, un sous-système de gestion des risques qui était « glissé » dans la cartographie du SMS. En effet le code ISM n'imposait le management des risques qu'au travers des objectifs de la compagnie, ce qui était et, qui est toujours, relativement flou pour des esprits cartésiens comme les nôtres.
    2. Pour ce qui concernait la santé et l'environnement, j'avais tendance à créer un sous système à part… qu'il fallait ensuite intégrer également dans le SMS (donc deux sous-systèmes supplémentaires aux § du code ISM).
    3. En intégrant ces deux sous systèmes dans le SMS nous restions en conformité avec le code ISM qui, je me dois de le dire, n'intègre la protection de l'environnement que de la « manière SNCF » c'est à dire en accrochant le wagon « environnement » ici et là !
    4. NB : Nous nous mettions ainsi en conformité avec le déjà existant programme HSE de la société, cqfd !
    5. Il faut quand même signaler qu'un SOHSP comprend la participation des travailleurs, la formation HSE, la traçabilité, les enquêtes internes concernant tous les évènements concernant la santé et la sécurité, plus une évaluation systématique et la progression continue du programme … qui sont déjà des exigences contenues dans d'autres chapitres du code ISM ( Opérations à bord § 7, Préparation aux situations d'urgence § 8, notification et analyse § 9, gestion des équipements critiques § 10.3). Donc afin de ne pas se répéter, il va falloir choisir!
    6. Choix de la répartition. Il y a deux écoles :
      • Conserver tous les items dans les chapitres initiaux et donc, dans le chapitre nouveau, « renvoyer » à chaque fois au chapitre correspondant.
      • Tout regrouper dans le chapitre nouveau et faire un renvoi dans les chapitres existants.
      Comme les auditeurs vont mettre quelque temps à s'adapter, il vaut peut-être mieux choisir la première solution.
    7. Aujourd'hui j'aurais donc tendance à regrouper le management des risques professionnels et le management HSE (hygiène, sécurité et protection de l'environnement) dans un sous système unique avec un renvoi vers leurs chapitres respectifs pour les mesures de réduction de risques suivantes :
      • Permis de travaux ou entrée espaces clos, change management, pre-job meeting et autres procédures critiques (soutage, déchets, BWM) du chapitre 7 «OPERATION à BORD»
      • Management des systèmes critiques et fonctionnement en mode dégradé dans chapitre 10 « MAINTENANCE »
      • Formation ISM dans chapitre 6 «RESSOURCES HUMAINES»
      • Exercices et entraînements dans chapitre 8 « PRÉPARATION aux SITUATIONS d'URGENCE »
      • La procédure drogue alcool dans le chapitre 6 également
      • La procédure facteurs humains (fatigue, stress et comportement) dans le chapitre 6 également
      • Enquêtes et analyse dans chapitre 9 «NOTIFICATION et ANALYSES»

    8. Il est évident que le chapitre correspondant à la gestion des risques manque dans le code ISM. Il pourrait s'intercaler entre les §2 et 3 et s'intituler § 2bis «Gestion des risques ou Risk Management» par exemple et définirait :
      • L'identification, évaluation et réduction des risques pour le personnel, le navire et l'environnement c'est à dire le «DUP+» (voir plus haut)
      • Une explication et un renvoi des procédures ou mesures ci-dessus vers la partie du SMS correspondante lorsque nécessaire.

    Quelle que soit votre décision, la voie est enfin tracée d'une manière un peu plus claire. Conseil : pour vos équipages et vos auditeurs externes prenez la solution N°1.

    En conclusion

           Commencez donc tout de suite par compléter votre DUP, profitez de cette révision pour mettre en place un programme de formation ISM et revoir votre analyse de la criticité de vos équipements en y ajoutant la conduite en mode dégradé … bonne chance !
Cdt Bertrand APPERRY
AFEXMAR AFCAN MIIMS
Septembre 2009
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