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Analyse du management de la sécurité selon le code ISM
à l'heure de la cybersécurité et de la pandémie covid 19

ou
Initiative pour une révision du code ISM et la création d'une formation ISM spécifique dans STCW
 


Le retour d'expérience du naufrage de HOFE nous a forcé à organiser la sécurité de notre industrie selon le code ISM.
En fait, les bases de construction ou d'opérations des navires sont restées les mêmes, seule leur organisation a été standardisée et elle s'applique aujourd'hui à tout ce qui flotte.
Le code ISM est un standard succinct qui a l'énorme avantage d'avoir tout prévu ou presque.
En effet, après la sécurité des opérations il a aussi, par force, prévu la sécurité en cas d'urgence, mais petit bémol, la sécurité comportementale c'est à dire le facteur humain est toujours pratiquement à l'état d'intention (texte trop sibyllin souvent dans le code ou alors non obligatoire) et pourtant la gestion du facteur humain était en théorie le principal objectif du code ISM.

Pour comprendre cela, voyons rapidement le contenu du code tel qu'il est aujourd'hui.
  1. Quels sont les éléments «facteur humain» qui entrent dans une sécurité opérationnelle ?
  • Organisation : identification des opérations, constitution des équipes, critères d'intervention.
  • Connaissance de ce qu'il faut faire : formation et familiarisation.
  • Évaluation des risques connus y compris les plus récents comme les cyber-risques (résolution MSC 428 applicable 1er Janv 2021) ou les risques liés à une pandémie : réflexion globale dans un SMS avant application via des procédures compagnie (procédure cyber et procédure COVID 19).
  • Actions courantes planifiées sans possibilité d'oubli : programme de maintenance sur informatique avec alertes.
  • Préparation des opérateurs : adaptation aux conditions locales (jour nuit, froid chaleur, mouvements du navire, interface portuaire).
  • Aide à l'exécution : check-lists lorsque nécessaire.
  • Vérification d'exécution : cross-check.
  • Contrôle de fonctionnement par inspections, audits internes et revues : résultats.
  • «Reporting» systématique vers la direction et enregistrements.
  • Analyse des dysfonctionnements pour éviter la récurrence (retour d'expérience).
  1. Quels sont les éléments de «facteur humain» qui entrent dans une sécurité d'urgence ?
  • Identification et description de toutes les situations d'urgence et pour chaque navire.
  • Préparation à répondre avec aides à la décision (fiches sécurité et sûreté).
  • Maintien des équipements d'urgence en état (mode dégradé y compris cyber, incendie et évacuation).
  • Maintien de la compétence : formation continue via exercices et entraînements programmés.
  • Qualité de la préparation : Évaluation de la préparation des équipes d'urgence à bord et à terre (indice de performance).
  • Retour d'expérience sur situations réelles ou simulées dans le cadre de l'amélioration continue de la préparation de l'équipage à répondre.
  1. Quels sont les éléments de «facteur humain» pour la sécurité comportementale ?
  • État physique des membres d'équipage à bord (du matelot au Capitaine) et du personnel à terre (membres de la cellule de crise /cadre de permanence 24/7) : Santé et fatigue.
  • État mental du personnel et principalement du personnel à bord (effets de la vie confinée du marin).
  • Culture sécurité globale de la compagnie et culture sécurité personnelle de chaque membre du personnel du PDG au dernier des matelots.
  • Niveau qualité du travail en équipe : teamwork ou crew-resource management (CRM).
Souvent ces éléments sont bien déterminés, parfois beaucoup moins car cette sécurité comportementale fait peur, ce n'est certainement pas une science exacte peu s'en faut.
  1. Mais où trouver le facteur humain dans le code lui-même ?
Alors qu'un chapitre spécial aurait pu être prévu dans le code, on peut y trouver quand même quelques références au facteur humain.
Que ce soit dans les objectifs ou dans les exigences on trouve des références surtout via le management des risques qui est un réflexe humain inné.
En ce qui concerne la santé, le code est resté très succinct en ne parlant que «d'aptitude physique» en général.
Les éléments concernant la fatigue due principalement aux conditions de vie à bord (confinement, rythmes, mouvements du navire, vibrations, décalages horaires quasi permanents, solitude familiale) sont complètement relégués dans des circulaires adjacentes.

Références oui, mais plus ou moins obligatoires qui laissent la possibilité à certains pavillons de les oublier complètement.
  1. Quels sont ces éléments de référence ?
D'abord dans le titre management comprend «organiser et diriger» qui sont les bases de la gestion du facteur humain.
Un marin est initialement formé puis familiarisé au navire sur lequel il va travailler durant son embarquement et ensuite familiarisé à son propre emploi à bord.
On lui demande ensuite de travailler selon le principe de l'évaluation systématique des risques et de prendre les mesures de réduction de risque ALARP (as low as reasonably possible) : celles du SMS de la compagnie et celles supplémentaires qu'il pourra prendre en fonction de son aptitude personnelle (fatigue/ santé/connaissance/expérience), en gros selon sa culture sécurité personnelle.
Il travaille selon un programme 24/7, une organisation de son activité (nombre d'heures de travail limité) suivi d'un repos échelonné sur les 24 heures à la différence de la plus-part des travailleurs terrestres.
Mais pour tout cela on lui demande d'être «apte physiquement» sans plus.

Comment pourrait-on améliorer ce code ?
  1. Améliorations possibles
Quelques améliorations ont été effectuées depuis la naissance du code, jusqu'à ajouter des notes de bas de page «à titre de référence et d'indication» qui ont été incluses dans les dernières éditions du code. C'est une solution approximative qui mène certainement plus facilement à un consensus lors de son approbation, mais qui laissent souvent les opérateurs sur leur faim.
Mais cette solution étant plus susceptible de «passer» à l'OMI, notre demande d'amendement au code comporte, sous cette forme de «foot note», des recommandations existantes sur la santé au travail et plus particulièrement la fatigue qui reste toujours le sujet tabou de notre industrie.
De plus avec l'expérience de la COVID 19, le terme santé/prévention ne peut plus aujourd'hui être laissé de côté.
Enfin comme des espaces laissés trop flous dans le code existant favorisent des interprétations à minima, de nombreuses clarifications sont également jugées nécessaires.
  1. Projet AFCAN/HYDROS/JEUNE MARINE «Code ISM 2020»
Fort de l'analyse ci-dessus et d'un important retour d'expérience sur les parties à améliorer du code ISM, un projet de propositions d'amendement au code ISM est né au sein de l'AFCAN, projet qui pour avoir plus d'impact, pourrait être partagé par les autres associations MARMAR à leur convenance.

Pourquoi AFCAN ?
Parce que depuis plus de 20 ans une rubrique ISM parait dans la revue trimestrielle de l'association.

Pourquoi HYDROS ?
L'association HYDROS comprend nombre d'officiers de la marine marchande intéressés par le sujet et qui pourraient transmettre leur avis via leur site.

Pourquoi JEUNE MARINE ?
La revue jeune marine est une référence dans l'information des officiers de la marine marchande jeunes et anciens, navigants ou non. De nombreux articles à la pointe du progrès y sont consultés
  1. Détails du projet
Une proposition d'amendement au code ISM serait transmise à la direction des AFFMAR pour suite à donner.
Si l'origine est tricéphale AFCAN/HYDROS/JEUNE MARINE, la proposition a en effet plus de chance d'être lue d'abord, et peut-être étudiée pour une action éventuelle de l'administration vers le groupe compétent de l'OMI (sous-comité HTW).
Une telle proposition pourrait être concomitante avec une proposition de formation spécifique ISM qui manque beaucoup dans le cursus de nos équipages. En effet, à l'aube d'une révision du code STCW demandée par l'ICS, il nous a semblé opportun de faire suivre une proposition d'amendement à la convention et au code STCW pour faire valoir une nouvelle formation ISM naturellement insérée dans le cursus obligatoire du marin d'aujourd'hui.
Au regard de la profession ces propositions groupées auraient ainsi plus de sens, et avoir du sens, on aime ça à l'OMI.
juin 2020.
Cdt Bertrand APPERRY
AFEXMAR-AFCAN-HYDROS
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