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11       SYNTHESE DES INVESTIGATIONS

Les principales phases couvertes par la Mission sont :

o        Le transfert de Classe du bureau veritas au RINA

o        La décision de confier les travaux de Visite Spéciale quinquennale au chantier ADRIATIC SHIPYARD de BIJELA

o La définition /l'exécution et le contrôle des travaux à BIJELA à l'été 1998

o L'affrètement du navire par TOTAL et les opérations liées

o Le dernier voyage de l'ERIKA jusqu'à sa perte.

Le Collège Expertal a procédé à des analyses des actions/des absences d'actions des entités et/ou des personnes intervenantes au long de cette période et de leurs éventuelles conséquences en tenant compte des dispositions des règlements en vigueur et des usages courants.

Ces analyses partant des faits et des informations recueillies s'inscrivent dans le cadre de la mission confiée au Collège Expertal, avec comme d'usage l'intention d'êtres utiles au Juge du Fond qui sera éventuellement saisi.

11.1            L'ERIKA ET SON CADRE DE GESTION

11.1.1  Le rôle et les actions de TEVERE SHIPPING

TEVERE SHIPPING a fait entièrement confiance à PANSHIP, son gestionnaire technique et s'est complètement déchargé sur lui pour définir et superviser les travaux nécessaires au maintien en classe de l'ERIKA à la suite de la Visite Spéciale quinquennale.


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11.1.2  Vetting

Certaines des Parties ayant critiqué notre analyse des problèmes de Vetting au niveau de la Note d'Etape, nous avons été amenés à préciser cette analyse dans l'Annexe 1 Vetting jointe (Annexe 1 complétée par ses Annexes 1A et 1B), annexe qui étudie dans le détail les opérations de Vetting réalisées par d'autres majors que TOTAL entre la fin des travaux à BIJELA et la perte de l'ERIKA :

a)        Les inspecteurs de Vetting des majors pétroliers n'ont pas l'obligation au titre des règles de l'OCIMF (organisme technique maritime des majors pétroliers) de visiter les citernes de cargaison ou de ballastage pour remplir leur mission. Ils ont l'obligation de respecter les règles de sécurité sur les navires en service. En pratique il n'y a jamais d'inspections à l'intérieur des citernes quand le navire est en opérations commerciales.

b)        D'août 1998 à décembre 1999 l'ERIKA a subi 11 visites de Vetting par 5 majors pétroliers différents, dont TOTAL : il a été refusé une fois par BP pour des non conformités sans rapport avec les structures. Au cours de ces visites :

i Aucun des inspecteurs n'a procédé à une visite de citernes de

cargaison ou de ballastage.

ii La partie « Structures » des rapports de Vetting a été remplie à partir du dossier de Classification du Bord et/ou à partir des déclarations du Commandant étant précisé que les Certificats de Classification n'étaient pas revêtus des réserves réglementaires (après le 23.11.1999).

Certains inspecteurs de Vetting se sont indirectement référés aux mesures d'épaisseur figurant au Document PAOLILLO en précisant que des travaux avaient été faits récemment à BIJELA et que les corrosions étaient faibles.

iii Aucune de ces opérations de Vetting, au nombre de onze (11), n'a permis de déceler l'état réel des structures de l'ERIKA dans les citernes de ballastage n° 2.

11.1.3 L'affrètement

Le 22 novembre 1999 TOTAL a selon les usages courants conclu avec SELMONT une charte (dont la finalisation a eu lieu le 26 novembre), pour affréter l'ERIKA au voyage dans des conditions classiques en utilisant les services d'un courtier usuel pour ce type d'affrètements, PETRIAN SHIPBROKERS.


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11.1.4 Les actions menées parle Bureau Veritas jusqu'au départ de NAPLES pour BIJELA

11.1.4.i       Généralités

Certaines des actions/des absences d'action du bureau veritas sont difficiles à comprendre :

a)              La Visite Spéciale d'entrée en Classe a été faite en mai 1993 et, à la suite de multiples prolongations de validité des Certificats provisoires, les Certificats définitifs n'ont été délivrés que presque deux ans plus tard. Les documents remis par le bureau veritas n'apportent pas d'explication à ce décalage dans le temps.

b)              Les inspecteurs successifs qualifient de façon différente la peinture des citernes de ballastage : inexistante ou de qualité convenable ('fait")

c)              L'état des structures internes des citernes de ballastage n°2 semble avoir posé problème presque dès le début de la classification bureau veritas (première mention : juin 1993). Une visite sérieuse n'a eu lieu qu'en août 1996 à PUNTA DELGADA et a conduit à la demande de faire des mesures d'épaisseur.

Ces mesures ont eu lieu à RAVENNE en avril 1997 et ont donné lieu à des travaux de réparation sur la partie supérieure d'une partie seulement des porques dans les citernes de ballastage n°2.

11.1.4.ii      Mesures d'épaisseur

a)   1993

Les mesures d'épaisseur faites en mai 1993 et figurant au dossier bureau veritas font apparaître des niveaux de corrosion plutôt faibles : aucune des mesures n'est supérieure à 25 % de corrosion et une bonne partie est comprise entre 5 et 10%.

Une telle situation ne permet pas d'expliquer l'origine des travaux de réparation qui ont été faits en avril 1997 à RAVENNE sur les parties supérieures de cinq porques (3 à bâbord et 2 à tribord) dans les citernes de ballastage n°2.

Cela voudrait dire que les mesures d'épaisseur de 1993 ne reflétaient pas fidèlement la réalité car les structures internes des citernes de ballastage n° 2 n'ont pas eu le temps de se détériorer de façon très sensible entre la situation de SETUBAL en mai 1993 et celle qui a conduit à remplacer partiellement des porques à RAVENNE en avril 1997 (environ 1mm de corrosion additionnelle de 1993 à 1997).


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b)   1997

Les mesures d'épaisseur faites à RAVENNE en avril 1997 font apparaître des corrosions très limitées.

Cela voudrait dire que ces mesures d'épaisseur ne reflétaient pas fidèlement la réalité puisque d'une part certaines parties hautes de porque ont dû être changées et que d'autre part les structures internes de la citerne 2td n'ont pas eu ensuite le temps de se détériorer de façon sensible entre la situation de RAVENNE en avril 1997 et celle constatée sur les épaves de la citerne de ballastage 2td de l'ERIKA (en dehors bien entendu des parties effectivement réparées à BIJELA). Curieusement, comme déjà dit en 9.1.4, certaines épaisseurs de pont sont supérieures à celles mesurées en 1993 à SETUBAL

11.1.5 Les Documents / les Certificats du RINA

11.1.5.i      Form Visite 1

La Form Visite 1 établie le 26.08.1998 au départ de BIJELA par Mr PATANE (Annexe R23) ne comportait aucune mention du fait que les calculs de modules de résistance n'avaient pas encore été établis par les Services centraux du Siège. Le siège du RINA n'a pas réagi à l'absence de cette mention. L'absence de cette mention pouvait induire en erreur les représentants des Etats du Port et des majors pétroliers (Vetting) qui ont inspecté le navire pendant cette période.

11.1.5.ii     Certificats définitifs

Ces Certificats, sans recommandation, ont été remis par le RINA le 16 Décembre 1998 après que les Services du Siège aient procédé au calcul des modules de résistance (satisfaisants sur la base des épaisseurs figurant au Document PAOLILLO) et après passage devant les comités ad hoc du RINA.

Comme vu aux § 8.2.3 et 10 ci-avant le Document PAOLILLO ne donne pas une image conforme des structures de l'ERIKA à BIJELA : il est clair que les Services Centraux du RINA n'ont pas examiné sérieusement le Document PAOLILLO, dont il est certain qu'il n'est pas le reflet de mesures des épaisseurs réelles des structures à NAPLES et à BIJELA.


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11.1.5.iii     La première visite annuelle

Lors des opérations finales de la première visite annuelle à AUGUSTA du 22/24 Novembre 1999 Mr ALGA a décelé des corrosions des lisses de pont dans la citerne 2 Td (zones suspectes) et a, après contact avec sa hiérarchie (Mr RICCA) décidé de confirmer la classe de l'ERIKA jusqu'à fin Janvier 2000 dans l'attente de mesures d'épaisseurs.

La forme du visa porté sur le Certificat Coque ne pouvait pas permettre de connaître l'origine technique réelle de la recommandation (origine figurant dans le Rapport interne de Mr ALGA non remis au Bord).

Cette forme occultait donc l'existence de problèmes de structure que Mr ALGA avait lui-même décelés.

La présence du rapport de M. ALGA dans les documents du Bord et la motivation du Visa (zones suspectes ; mesures d'épaisseur) auraient été de nature à empêcher les inspecteurs du Vetting de donner un avis favorable pour l'affrètement de l'ERIKA.

11.1.5.iv     Situation depuis AUGUSTA jusqu'à l'arrivée à DUNKERQUE

L'ERIKA était en possession de certificats valables jusqu'à fin Janvier 2000 sans que le Bord, les inspecteurs de Vetting et de l'Etat du Port disposent des éléments leur permettant de connaître les raisons réelles de cette limitation de validité : des corrosions de structures dans certaines capacités de ballastage avec l'existence de zones suspectes.

11.1.6 Le chargement de l'ERIKA à DUNKERQUE et le Soutage

Les conditions du chargement à DUNKERQUE ne peuvent donner lieu à critique, que ce soit dans la séquence de chargement ou dans l'état final de chargement. Le fuel transporté (HSFO) était un produit classique même s'il devait être maintenu à 55°C.

Les existants en soutes au départ de DUNKERQUE ne permettaient pas de rallier GIBRALTAR dans des conditions de sécurité normales.


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11.2            les calculs de structures -  le processus de ruine

A partir des mesures d'épaisseur, des situations de chargement successives (Scénario Experts) et des états de mer rencontrés, le Collège Expertal, avec le concours des Sapiteurs, a confié à des organismes spécialisés travaillant sous son contrôle et celui des Sapiteurs (les Techniciens) la réalisation d'un ensemble complexe de calculs scientifiques avec comme objectif la recherche de l'éventuelle adéquation entre les résultats de ces calculs et les constatations faites sur les épaves et le processus de ruine.

Cette méthode de calcul, dite par éléments finis, est classique mais n'avait pas encore été utilisée à un niveau d'investigation tel que celui recherché par le Collège Expertal, ce qui explique le temps nécessaire pour sa mise au point.

Ces calculs (qui ont montré que l'ERIKA était correctement échantillonné au neuvage) ont permis de reproduire les avaries successives dans leur séquence :

o        Ecrasement des tirants entre cloison longitudinale et bordé de muraille aux couples 71/72/73 dans la citerne 2td ;

o        Cassure verticale du bordé de muraille le long du C74. La première constatation physique faite par le Cdt MATHUR (la prise de gîte vers 12h30 le 11.12.99) correspond à cette cassure ;

o        Cassure en deux du navire aux environs des C66-67.

Les structures de navires peuvent périr par trois voies différentes : des niveaux de contraintes trop élevés, des phénomènes liés à la fatigue des structures ou des déformations majeures liées au flambement.

Les calculs linéaires de structure ont montré que les niveaux de contraintes étaient élevés mais restaient dans des limites admissibles.

Les examens des épaves n'ont pas permis de découvrir de phénomènes de fatigue ni de phénomènes de sloshing.

Les calculs de ruine (éléments finis, calculs non linéaires) ont permis de mettre en évidence les phénomènes de flambement à l'origine de la ruine de l'ERIKA.

La séquence telle que décrite dans son étendue et dans son horaire montre qu'au moment où la gîte sur tribord a été constatée l'ERIKA était irrémédiablement perdu et n'avait pas le temps de gagner un lieu de refuge.


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11.3 reactions des intervenants entre le 11 decembre 1999 a 14 h 08 (heure du premier message de detresse) et le 12 decembre 1999 a 06 h 20, heure a laquelle l'erika s'est brise en deux.

11.3.1   TEVERE SHIPPING (Armateur) - SELMONT (Affréteur) - AMARSHIP (Opérateur)

L'armateur, l'affréteur et l'opérateur se situent dans la chaîne au-delà de PANSHIP et n'avaient aucun moyen réel d'intervenir, même s'ils ont été prévenus par PANSHIP.

11.3.2 Autorités du pavillon (MALTE)

Les Autorités maltaises n'avaient aucun moyen d'intervenir même si elles avaient été prévenues par PANSHIP.

11.3.3 PANSHIP (Commandant POLLARA et ses adjoints)

L'ERIKA a eu des problèmes pratiques pour informer directement PANSHIP de ses difficultés à partir de 14 h 08 le 11 décembre 1999.

Ce n'est qu'à 15 h 10 que PANSHIP a été informé de la situation (y compris la perte de fuel à la mer) via le SEA CRUSADER (navire RFA sur zone).

Le Cdt MATHUR a ensuite à 15 h 15 informé CROSSA ETEL que la situation était sous contrôle et qu'il retirait son message de détresse de 14 h 08 et le transformait en message de sécurité.

PANSHIP a alors informé l'armateur (TEVERE SHIPPING), le RINA à TRIESTE (M. FUMIS), PETRIAN SHIPBROKERS, AMARSHIP (l'opérateur de l'ERIKA) et HERALD MARITIME SERVICES, mais pas TOTAL. Par la suite PANSHIP a également contacté les Assureurs Corps et les Assureurs P and I.

Après la conversation téléphonique de 16 h 06 (MONACO Radio) entre le Cdt POLLARA et le Cdt MATHUR la décision de détourner l'ERIKA vers donges, port de refuge, a été prise comme le montre le changement de cap à 16 h 27 tel que porté au Journal de Bord.

PANSHIP a eu plusieurs contacts avec le RINA :

o        vers M. FUMIS auquel il a laissé un message sur boite vocale vers 15 h 30;

o        depuis M. FUMIS vers 18 h 30, qui a alors pris contact avec M. PONASSO (RINA) ;


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o        vers M. FUMIS vers 19 h 20 au sujet de l'information des autorités du pavillon ;

o        depuis M. FUMIS vers 19 h 50 (après un contact avec M. PONASSO) pour définir à quel moment alerter les autorités du pavillon

II ne ressort pas de l'étude des pièces communiquées et des auditions qu'à un quelconque moment, un contact ait été établi entre l'ERIKA et le Technical Advisor apparemment désigné par le plan SOPEP, M. FANCIUCCI, en conformité avec la procédure SOPEP.

Le Commandant POLLARA, probablement influencé par l'attitude rassurante du Cdt MATHUR, n'a pas vraiment demandé au RINA de mettre en place la procédure d'assistance technique. Il convient en outre de rappeler que TEVERE SHIPPING n'avait pas conclu à l'avance avec le RINA pour l'ERIKA un contrat de technical advisor, qui aurait conduit à mettre en place les outils techniques nécessaires pour l'intervention éventuelle du RINA (bases de calcul scientifiques propres à l'ERIKA).

A aucun moment ni le commandant MATHUR ni PANSHIP n'ont retransmis vers CROSSA ETEL ou TOTAL les informations concernant la perte de fuel à la mer.

L'étude des messages échangés et des auditions du Cdt MATHUR et du Cdt POLLARA montre que ce dernier s'est pour l'essentiel borné à recevoir des informations du Cdt MATHUR et à les retransmettre. La complexité maintenant connue des problèmes rencontrés fait que PANSHIP et plus particulièrement le Cdt POLLARA n'étaient pas en mesure d'apporter une aide réelle à l'ERIKA.

11.3.4  RINA

Le Collège Expertal n'a pu auditionner le RINA au sujet des éléments que PANSHIP dit lui avoir remis concernant le déroulement des événements.

Les éléments qui suivent ressortent donc des déclarations de PANSHIP/du Cdt POLLARA : PANSHIP dit avoir essayé de contacter le RINA (M. FUMIS) après 15 h 20 (enregistrement de message sur boîte vocale) puis avoir réussi à contacter M. FUMIS après 18 h 30. PANSHIP dit avoir transmis au RINA les informations reçues de l'ERIKA, c'est à dire gîte tribord, perte de fuel sur l'avant des manifolds, envahissement de la citerne 2 tribord et présence de fuel dans cette citerne de ballastage. M. FUMIS aurait retransmis ces informations à M. PONASSO (RINA à GENES).


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Cependant il faut noter que TEVERE SHIPPING n'avait pas signé de Contrat d'assistance avec le RINA alors même que le RINA était désigné comme Technical Advisor au niveau du plan SOPEP, plan que le RINA avait approuvé (avec ou sans l'annexe désignant un Technical Advisor, cf. 5.2.6 ii ci-avant).

Au titre d'un tel contrat d'assistance toutes les caractéristiques du navire (capacités, formes et structures) sont entrées en ordinateur de façon à permettre d'exécuter très rapidement divers calculs en cas d'incidents.

Même en l'absence d'un tel contrat, les spécialistes du RINA auraient pu donner des avis limités portant sur la cassure du bordé sous la flottaison et celle de la cloison longitudinale. Cependant il aurait été très difficile aux Services du siège du RINA d'aller beaucoup plus loin dans l'analyse des problèmes rencontrés par l'ERIKA sur la base des informations en leur possession sur l'état des structures de l'ERIKA (Document PALOLILLO dont on a vu ci-avant au § 8.2.3 qu'il n'était pas représentatif de l'état réel des structures de l'ERIKA).

Le RINA aurait-il eu l'action limitée décrite ci-dessus que cela ne lui aurait pas permis d'avoir une influence sur le déroulement des événements qui ont abouti à la perte du navire.

11.3.5  CROSSA ETEL

En tant que premier destinataire responsable de la mission de sauvetage de la vie humaine en mer, le CROSSA ETEL a reçu à 14 h 08 le premier message de détresse de l'ERIKA. L'ERIKA a annulé ce message de détresse à 15 h 15, puis l'a transformé en message de sécurité et a annoncé que la situation était sous contrôle et qu'il poursuivait sa route vers sa destination initiale.

Plus tard à 16 h 25 l'ERIKA a envoyé un nouveau message annonçant son changement de route vers un port de refuge, message confirmé ultérieurement. Sur une demande de CROSSA ETEL vers 23 h15, l'ERIKA a alors confirmé sa destination.

Les messages reçus de l'ERIKA par le CROSSA ETEL jusqu'au moment du second message de détresse (05 h 15 le 12 décembre 1999), n'ont jamais fait état de perte de fuel à la mer pas plus d'ailleurs que d'une situation difficile du navire : l'information majeure était que l'ERIKA se dirigeait vers un port refuge, qui était DONGES, après avoir annulé son premier message de détresse.

Le CROSSA ETEL a parfaitement rempli sa mission de sauvetage de la vie humaine en mer.


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11.3.6  COM BREST

COM BREST a été régulièrement tenu au courant par CROSS ETEL depuis la réception du premier message de détresse à 14 h 08.

11.3.7 CROSSA ETEL et COM BREST

Pendant l'après midi et le début de la soirée du 11 décembre 1999 le CROSS ETEL et le COM BREST ont concentré leur attention sur le minéralier MARIA K en grandes difficultés dans l'estuaire de la loire, ce qui a fait que les contacts vers l'ERIKA n'ont repris que vers 22 heures. Ces contacts n'ont pas fait apparaître de réactions alarmantes de la part du Bord.

Il est permis de se demander si l'âge de l'ERIKA (25 ans) la nature de sa cargaison (fuel lourd réchauffé) et la forte gîte annoncée par le Bord n'auraient pas dû conduire le COM BREST/le CROSSA ETEL à s'intéresser de façon suivie à l'évolution de la situation de l'ERIKA.

Cependant, même si le suivi de l'ERIKA par le CROSSA ETEL/COM BREST n'a pas été continu, cela n'a eu aucune influence sur le déroulement des événements qui ont abouti à la perte de l'ERIKA.

11.3.8 Les navires RFA (SEA CRUSADER et FORT GEORGE) et le NAUTIC

Ces navires ont été utiles en ce sens qu'ils ont relayé les informations de l'ERIKA vers PANSHIP.

Le SEA CRUSADER et le NAUTIC ont reçu de l'ERIKA un peu après 14 heures (pour transmission à PANSHIP) une information faisant état de fioul à la mer. Cette information, inaudible pour le CROSSA ETEL, (VHP : portée limitée) n'a pas été passée vers CROSSA ETEL.

Le FORT GEORGE a offert une première fois son assistance, déclinée par l'ERIKA, et n'a plus tard quitté les lieux qu'après avoir renouvelé cette offre encore déclinée.

11.3.9   TOTAL

La première information de l'ERIKA vers TOTAL (hotline) a été transmise vers 18 h 30 le 11 décembre 1999 mais n'a atteint le responsable de la hotline (M. GALONNE) qu'à 20 h 15, alors que le Cdt MARTENS avait été alerté dès 19 h 45 via une chaîne d'agents


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portuaires français (STOCALOIRE et POMME, lui-même alerté par PANSHIP).

Les responsables de TOTAL ont ensuite dans la fin de la soirée conservé le contact avec l'ERIKA via le Cdt MARTENS, qui a également assuré avec M. GALONNE les liaisons internes à TOTAL.

TOTAL a comme CROSSA ETEL et COM BREST fait confiance aux déclarations verbales et aux messages du Cdt MATHUR qui n'a pas fait état d'une situation difficile de l'ERIKA mais a toujours insisté sur le fait qu'il se dirigeait vers un port de refuge en ayant la situation bien en mains. Cela n'a pas conduit TOTAL à mettre formellement en place sa cellule de crise (voir pièce TOTAL n° 13) mais TOTAL a décidé une inspection de Vetting à l'arrivée de l'ERIKA à DONGES le 13 décembre.

Même si le suivi de l'ERIKA par TOTAL a, faute d'informations externes, commencé assez tardivement et s'est arrêté au milieu de la nuit du 11 au 12 décembre 1999, cela n'a eu aucune influence sur le déroulement des événements qui ont abouti à la perte de l'ERIKA.

11.3.10 Le Port Autonome de NANTES - SAINT-NAZAIRE (PANSN)

Après avoir reçu via POMME/STOCALOIRE des informations sur l'état de l'ERIKA (cassures sur le pont entre autres) le Commandant du PANSN n'a pas, vers 22 h 30, accepté en l'état l'entrée en loire de l'ERIKA.

Ce refus n'a pu avoir aucune influence sur le déroulement des événements qui ont abouti à la perte de l'ERIKA : vers 22 h 30 le 11 décembre l'ERIKA était à environ 140 milles de la bouée d'atterrissage en Loire et n'aurait pu y arriver avant de se briser en deux.

11.3.11 Le Cdt MATHUR

Lorsque le Cdt MATHUR s'est rendu compte que l'ERIKA avait pris une gîte importante et que du fuel s'écoulait sur l'avant du manifold avec une probable cassure de coque, il a mis en place deux actions :

o        l'une vers l'Etat côtier (CROSSA ETEL) en émettant un message de détresse sur INMARSAT C étant précisé que son message ne comportait aucune information sur la nature des événements ayant conduit à l'émission du message de détresse.


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o        l'autre vers PANSHIP (via le RFA CRUSADER pour des raisons pratiques) en émettant un message téléphonique et un message écrit donnant des informations sur la gîte, l'écoulement de fuel et la probable cassure de coque.

Pour se conformer aux conditions du plan SOPEP, le Cdt MATHUR aurait dû émettre vers le CROSSA ETEL et vers le Technical Advisor (RINA d'après le document remis par PANSHIP) une « Notification Initiale ».

Or le Cdt MATHUR n'a à aucun moment informé le CROSSA ETEL des fuites de fuel connues lors de l'émission de son message de détresse, même lors des contacts directs avec le CROSSA ETEL, qui se sont poursuivis jusque dans la soirée du 11 décembre 1999.

De même le Cdt MATHUR n'a pris aucun contact avec le Technical Advisor (RINA : plan SOPEP).

Par contre le Cdt MATHUR a convenablement informé directement ou indirectement (via PANSHIP) les autres entités et/ou les personnes qui devaient l'être au titre du plan SOPEP.

Cependant, si le Cdt MATHUR a transmis à PANSHIP toutes les informations en sa possession il ne semble pas être parvenu à une analyse globale de ces informations portant sur la gîte de l'ERIKA, la perte de fuel à la mer sur l'avant des traverses de chargement et la présence d'eau de mer et de fuel dans la citerne n°2 td. En conclure que le bordé était cassé dans la citerne 2td comme l'était la cloison longitudinale td entre les citernes 2td et 3 centrale parait logique aujourd'hui mais était moins évident à l'époque pour le Commandant de l'ERIKA en situation difficile par très mauvais temps : une telle analyse était à priori plus accessible pour PANSHIP et encore bien plus pour le RINA.

Le Cdt MATHUR aurait-il fait l'analyse décrite ci-dessus que cela n'aurait eu aucune influence sur le déroulement des événements qui ont abouti à la perte de l'ERIKA.

11.3.12 L'Equipage

Sous les ordres du Cdt MATHUR l'équipage s'est conduit avec détermination et professionnalisme y compris lors de la phase d'évacuation réalisée avec succès dans des conditions extrêmement difficiles.


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11.4 analyse des divergences sur l'etat des structures selon document paolillo et selon les epaves

11.4.1  L'état des structures au départ de Dunkergue (d'après les épaves)

La succession des événements (gîte sur tribord, détachement de l'épave LA PEROUSE) montre que les avaries à l'origine de la perte de l'ERIKA sont d'abord survenues à tribord dans la zone comprise entre les couples 66 et 74 c'est à dire dans la citerne de ballastage latérale n° 2 td (capacité de ballastage séparée - SBT - en application depuis 1997 de la règle n°13 de MARPOL 73/78 Annexe 1). Ces capacités de ballastage sont par nature les plus sujettes à corrosion.

Les mesures réalisées sur les épaves, celles réalisées au fond de la mer par le CSG CONSTRUCTOR, celles réalisées à BREST sur les épaves PONT et LA PEROUSE et celles réalisées sur l'épave NABERAN ont fait apparaître des corrosions généralisées et très élevées, dépassant souvent très largement les valeurs limites acceptées par le RINA comme le montrent les quelques exemples suivants touchant les citernes latérales n°2 :

§         Epaisseurs du pont : corrosion de 28 à 40% dans les citernes latérales

§         Lisses de pont : corrosion de 55 à 60% pour les lisses non changées à BIJELA dans les citernes de ballastage (admissible par le RINA : 25 % en local mais aussi de l'ordre de 15% en moyenne sur la largeur du pont pour respecter les 90% du module de résistance réglementaire - voir en 10.2.1 ci-dessus)

§         Tirants des anneaux transversaux (origine de la ruine du navire) : corrosion de 39% à 56% pour les âmes et de 26 à 36% pour les semelles (admissible par le RINA : 25%)

§         Partie haute des transversales de murailles et de cloisons longitudinales : corrosion de 43 à 71% (admissible par le RINA : 25%).

Il a même été constaté des trous de corrosion dans ces zones (leurs positions sont précisées dans le Rapport de l'INSTITUT de SOUDURE en date du 2 octobre 2003 n°40662, cf. Annexe n°R32)

Pareille situation ne pouvait qu'être ancienne et certainement pas le résultat d'une corrosion survenue entre les réparations de BIJELA en juillet 1998 et la perte de l'ERIKA en décembre 1999 ni non plus d'une corrosion survenue au fond de la mer entre décembre 1999, date du sinistre, et septembre 2002, date des mesures : la faible teneur d'oxygène libre par 120 m de fond empêche le développement de la corrosion.


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11.4.2  Comparaison entre l'état des structures au départ de BIJELA selon Document PAOLILLO et l'état des structures selon les épaves.

L'Article 8.2.3 et son Annexe R27 montrent qu'au départ de BIJELA les structures de l'ERIKA ne pouvaient pas être dans l'état décrit par le Document PAOLILLO : les différences d'épaisseur systématiques et importantes constatées entre le Document PAOLILLO et les mesures faites sur les épaves ne peuvent avoir comme origine la corrosion, très minime compte tenu de la durée d'immersion et de la profondeur d'eau (faible teneur d'oxygène libre).

Les mesures d'épaisseur sur les épaves ont été réalisées avec le souci de préserver le caractère contradictoire des opérations d'expertise : les résultats de ces mesures ne peuvent donc être contestés.

Il en résulte que l'un des ensembles de mesures d'épaisseur ne correspond pas à la réalité.

Les mesures d'épaisseur sur les épaves ne peuvent être mise en cause et il en résulte que les mesures d'épaisseur figurant au Document PAOLILLO ne sont absolument pas fiables. Ce manque de fiabilité ne peut avoir que trois origines :

a)               Les "mesures d'épaisseur PAOLILLO" sont entachées d'erreurs systématiques liées au matériel de mesure : cette hypothèse n'est pas vraisemblable car les différences constatées avec les mesures sur les épaves si elles sont toujours importantes, sont cependant variables en pourcentage comme en valeur absolue.

b)               Les "mesures d'épaisseur PAOLILLO" ont été faites en partie et ont ensuite été corrigées (majoration des épaisseurs) de telle sorte que les résultats officiellement présentés au RINA ne conduisent qu'à des réparations très limitées en fonction des règlements RINA.

c) Les "mesures d'épaisseur PAOLILLO" n'ont pas été faites et le Document PAOLILLO a été établi de telle sorte que les résultats présentés au RINA ne conduisent qu'à des réparations très limitées en fonction des règlements RINA.

En conclusion, le Document PAOLILLO (pièce 22 du RINA) ne représentait absolument pas la situation réelle des structures de l'ERIKA lors de son arrivée à BIJELA.


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11.4.3 L'étendue des réparations nécessaires à BIJELA au titre des règlements du RINA

34,5 t de structures ont été changées dans la tranche 2 alors que l'application normale des règlements et instructions du RINA aurait dû conduire au remplacement de 209 t de structures. Les différences sont impressionnantes quelle que soit la catégorie des structures : pour les murailles et leurs lisses l'on passe même de 01 à 34 t et pour les anneaux transversaux, à l'origine du sinistre, on passe de 16,5 t à 67 t.

Ces différences de tonnage sont bien sûr la conséquence de la situation réelle des épaisseurs de structure de l'ERIKA à son arrivée à BIJELA (épaisseurs retrouvées sur les épaves dans les zones non réparées).

Il en résulte que :

o        soit l'Inspecteur local du RINA n'a pas appliqué les règlements et instructions du RINA (pourcentages limites de corrosions et épaisseurs minimales) alors qu'il avait connaissance des épaisseurs réelles dont certaines étaient évidentes sans même faire de mesures (lisses de pont) ;

o        soit l'Inspecteur local du RINA contrairement à ses déclarations, a fait entière confiance aux "mesures d'épaisseur" annoncées par PAOLILLO : ces "mesures d'épaisseur" sont pratiquement toujours supérieures aux épaisseurs correspondant aux limites de corrosion acceptables par le RINA.

Les mesures figurant sur le Document PAOLILLO ont manifestement été établies avec comme objectif une limitation drastique du volume des réparations à entreprendre et donc de leur coût.

11.4.4 Analyse comparative du dossier PAOLILLO et du dossier SOBRENA / ALPHA TECHNIQUES

L'impressionnante divergence de productivité dans les opérations de mesure d'épaisseur entre SOBRENA / ALPHA TECHNIQUES et PAOLILLO (entre 1 à 2 et 1 à 4) ne peut pas s'expliquer par des raisons techniques (la base, l'ERIKA, était la même dans les deux cas) ni humaines car il s'agit d'opérations faites par des techniciens et non par des machines. SOBREN / ALPHA TECHNIQUES étant reconnus comme des professionnels fiables il en résulte que PAOLILLO n'aurait pas pu effectuer les 7842 mesures qui figurent sur les 225 pages de son document. PAOLILLO aurait pu, au plus, effectuer la moitié des mesures qu'il annonce.


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11.4.5  Conclusions sur l'état des structures / le Document PAOLILLO

L'appréciation de l'état des structures peut se faire à partir soit de l'état de l'ERIKA au départ de BIJELA défini par l'ensemble constitué par le Document PAOLILLO et les plans et factures du chantier de BIJELA, soit de l'état des épaves de l'ERIKA (mesures d'épaisseur au fond et sur les épaves PONT, LA PEROUSE et NABERAN après leur mise au sec).

Aucune corrosion significative n'a pu intervenir au fond de la mer (faible teneur en oxygène libre) ni même sur les épaves relevées ce qui aurait donc dû conduire à une quasi identité de ces deux états. Il n'en est rien : le niveau de corrosion relevé sur les épaves n'est pas du tout du même ordre de grandeur que celui résultant du Document PAOLILLO pour les éléments de tôlerie qui n'ont pas été changés à BIJELA. Par contre les quelques éléments de tôlerie changés à BIJELA ont conservé leur épaisseur (corrosion pratiquement nulle).

Nous sommes donc confrontés d'une part à des résultats des mesures d'épaisseur sur les épaves (mesures effectuées sous le contrôle du Collège Expertal dans le respect du caractère contradictoire des opérations d'expertise) et d'autre part à des « mesures d'épaisseur » figurant dans le Document PAOLILLO approuvé par le RINA (M. PATANE), « mesures » dont nous avons vu qu'elle comportent des erreurs aussi importantes que flagrantes et nombreuses.

La seule explication de cette situation est que le Document PAOLILLO n'est pas le résultat, comme il aurait dû l'être, de mesures faites sérieusement par un professionnel compétent et strict sous le contrôle du représentant local du RINA : la nature et l'ampleur des divergences montrent que le Document PAOLILLO a été établi sans tenir compte de la situation réelle de corrosion des structures et ce dans le but de minimiser le tonnage des structures à changer dans la zone des citernes latérales de ballastage n°2.

Ce résultat a d'ailleurs été obtenu puisque le tonnage changé à BIJELA dans cette zone a été de 34,5 t alors que l'application des règles du RINA aurait conduit à remplacer 2091 de structures, soit 6 fois plus (Le gestionnaire PANSHIP avait prévu 93 t dans son appel d'offres pour cette zone). Au plan économique le coût des réparations de structures prévues par le contrat entre TEVERE SHIPPING et ADRIATIC SHIPYARD s'élevait à environ 500.000 USD alors que la facturation a été de 157.446 USD.

Cette situation ne peut être le résultat de simples erreurs matérielles faites par PAOLILLO puisque les mesures auraient dû être contrôlées au moins par sondage par l'Inspecteur désigné par le RINA.


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Outre le résultat des "mesures d'épaisseur" du Document PAOLILLO, il convient aussi d'examiner les conditions dans lesquelles ces mesures auraient été faites d'après les déclarations de l'Inspecteur du RINA, M. PATANE, du superintendant de PANSHIP, M. COSTIGLIOLA, de M. PAOLILLO et du RINA (Dires).

La majorité des mesures (à l'exception de celles des citernes de ballastage n°2) auraient été faites à partir de radeaux alors que l'ERIKA était sur dock flottant. Le remplissage de citernes sur le dock pose des problèmes pratiques (collecteur d'incendie) et aurait présenté des risques très importants tant pour le navire que pour le dock lui-même, ce que le chantier n'aurait pas accepté.

De plus, les ouvertures dans les fonds n'ont été fermées que la veille de la remise à flot (déclaration de M. PATANE) ce qui interdisait le remplissage des capacités sur lesquelles donnaient ces ouvertures.

Cette analyse et les déclarations très contradictoires faites par MM. COSTIGLIOLA, PATANE (rapport officiel du RINA) et PAOLILLO sur la durée des "mesures" d'épaisseur par M. PAOLILLO (entre 6 jours d'après le rapport officiel du RINA et 21 jours selon M. PAOLILLO) et sur leurs conditions d'exécution renforcent considérablement la probabilité que les mesures d'épaisseur "PAOLILLO" n'aient pas été faites ou à tout le moins n'aient été faites que partiellement.

Enfin, PAOLILLO aurait mesuré un nombre de points d'épaisseurs de 50 % plus élevé que la pratique normale. Sachant que c'est Parmateur/le gestionnaire PANSHIP qui paie la Société PAOLILLO au nombre de points mesurés on mesure l'invraisemblance d'une telle situation.

Ce faisceau d'éléments converge indiscutablement vers le fait que le Document PAOLILLO n'est pas le reflet de la réalité mais d'une volonté de l'armateur TEVERE SHIPPING /du gestionnaire PANSHIP de limiter l'étendue des travaux de tôlerie et donc leur coût, malgré l'état de corrosion avancée du navire. Il semble difficile que cette approche soit passée inaperçue de l'inspecteur local du RINA (M. PATANE) même si ce dernier n'a pas été présent lors de la totalité des opérations de "mesures d'épaisseur" que PAOLILLO dit avoir menées.

Le Collège Expertal aurait souhaité pouvoir auditionner M. Vincenzo PAOLILLO mais cela n'a pas été possible (cf. § 3.4 et Annexes R1 et R2)

Le Document PAOLILLO n'a été transmis vers les Services Centraux du RINA par M. PATANE qu'en septembre 1998 et ce contrairement aux procédures des Sociétés de Classification : les calculs de module de résistance auraient dû être faits par les Services Centraux du RINA sur la base de ce document (et des remplacements prévus d'éléments de structure) avant le départ du navire sauf mention explicite sur la Form Visite n°1, mention qui n'existe pas.


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A réception du Document PAOLILLO, les Services centraux du RINA n'ont eu aucune réaction ce qui veut dire que ce Document PAOLILLO n'a pas été examiné sérieusement par ces Services Centraux : les premiers doutes ressentis par le Collège Expertal auraient dû être partagés par ces Services Centraux et les analyses qui ont suivi au niveau du Collège Expertal auraient alors dû être faites par les Services Centraux du RINA.

Il ressort des éléments décrits ci-dessus que, lors de la Visite Spéciale Quinquennale, le RINA est loin d'avoir rempli les tâches qui lui incombaient d'après ses propres règlements que ce soit au niveau de son inspecteur local, M. PATANE (dont le rôle exact au niveau de rétablissement du Document PAOLILLO n'a pu être appréhendé) ou de ses Services Centraux qui ont fait preuve de laxisme dans l'examen de ce même Document PAOLILLO.

Le Document PAOLILLO, en rien conforme à la réalité, a été établi pour permettre de réduire de façon drastique le volume et le coût des travaux de structure nécessaires dans le cadre de la Visite Spéciale quinquennale.


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