Le processus de l'instruction et du jugement des délits maritimes est, ou était, défini dans la loi du 17 décembre 1926 portant Code disciplinaire et pénal de la marine marchande, ou CDPMM, qui établissait en particulier les dispositions suivantes :
La recherche du ressort d'un administrateur des affaires maritimes enquêteur avec renvoi, selon les faits constatés, soit au procureur de la République soit au président du tribunal maritime commercial, ou TMC. Dans le second cas : L'instruction qui, selon les délits poursuivis, était effectuée soit par l'administrateur enquêteur, soit par celui-ci plus un Commissaire rapporteur issu du corps des officiers de marine. Le jugement était rendu par un Tribunal Maritime Commercial dont la composition était définie par l'article 90 de la loi. Elle comprenait un président magistrat du TGI, des représentants des affaires maritimes, un capitaine de navire et un pair de l'accusé. L'intervention du Ministère Public consistait, selon les délits jugés, soit de la simple lecture du rapport de l'administrateur enquêteur par le greffier, un «secrétaire administratif des affaires maritimes», soit du réquisitoire du Commissaire rapporteur. A noter que l'article 93 du CDPMM prévoyait la possibilité du pourvoi en cassation mais pas de l'appel du jugement prononcé. Or récemment des projets de loi, texte de loi et décision du Conseil Constitutionnel sont venus abroger, modifier ou proposer de modifier profondément des articles de cette loi du 17 décembre 1926. Ce sont en particulier et pour ceux portés à notre connaissance :
Auprès de chaque tribunal de grande instance visé par l'article 706-107 alinéa I il est instauré un tribunal maritime,(ci après désigné par TM), qui a compétence exclusive pour le jugement des délits maritimes définis à l'article 24° du code disciplinaire et pénal de la marine marchande. Le tribunal maritime est composé d'un magistrat… Le tribunal maritime est composé en outre de deux assesseurs… N.B. Il était prévu que le premier assesseur ait exercé au service pont des fonctions de direction au sens de STCW et que le second assesseur ait exercé des fonctions de navigation au commerce ou à la pêche ou pratiqué la navigation de plaisance. La loi 2008-324 traite, entre autres, de Dispositions relatives aux prérogatives du capitaine en matière de police et de sécurité du navire en reprenant une partie du projet de loi mais n'aborde pas le Jugement des Infractions Maritimes. Quant à la décision du Conseil Constitutionnel, prise à la suite d'un pourvoi en cassation de pêcheurs d'Etaples, elle a conclu à l'inconstitutionnalité de la composition du TMC, a donc abrogé l'article 90 du CDPMM, et a décidé qu'il siégerait désormais dans la composition des juridictions pénales de droit commun. Une note du site officiel Service-Public.fr précise : Le tribunal est composé de la même façon que la juridiction pénale de droit commun - Tribunal correctionnel - Tribunal de police Or quelle est la composition du tribunal correctionnel ? Le principe : La composition est collégiale: Le tribunal est composé de trois juges ( un président et deux juges) , du procureur de la République, du greffier. L'exception : La composition en juge unique Certains délits peuvent être jugés par un juge unique mais il ne peut prononcer une peine de prison ferme d'une durée supérieure à cinq ans. Quels sont les délits qui pourraient faire qu'un marin (capitaine ou autre) soit déféré devant le TMC ? Ce sont ceux visés par les articles suivant, avec les peines prévues par le capitaine :
On voit donc que, sauf élévation du niveau des peines depuis celles relevées dans le texte déjà ancien possédé par le rédacteur, toutes sont inférieures à 5 ans et que le tribunal pourrait donc siéger en Juge unique, toujours en restant dans le cadre de la loi portant CDPMM puisque seul son article 90 a été abrogé par la Conseil Constitutionnel. Reste évidemment l'éventualité, extrêmement probable d'ailleurs, qu'une loi reprenant les termes du projet initial précité relatifs à la création d'un Tribunal Maritime et son décret d'application voient ou même aient vus le jour. Ce qui ne pourrait être qu'après le 02 juillet 2010, date de la décision du Conseil Constitutionnel car on ne peut penser que cette haute instance ait délibéré et décidé sur un texte de loi déjà obsolète. Que ressort-il de ce qui précède ? D'abord, que sauf l'éventualité ci-dessus, c'est toujours le CDPMM dans son texte à jour à la date de la décision du C.C., amputé uniquement de son article 90, qui s'appliquerait, seule la composition du Tribunal étant modifiée. Qu'en serait-il dans le cas d'une nouvelle loi évoquée ci-dessus en tenant compte de la décision du C.C. ? En composition en juge unique il n'y aurait apparemment pas de problème, sauf peut-être pour les deux assesseurs, non magistrats, pour lesquels il faudrait trouver une dénomination conforme à la loi. Cependant il pourrait en surgir un, sachant que dans la composition du tribunal correctionnel il est prévu que : Le juge unique peut décider, d'office ou à la demande des parties ou du ministère public, de renvoyer l'affaire devant le tribunal correctionnel compétent siégeant en formation collégiale si ce renvoi lui paraît justifié en raison de la complexité des faits ou de l'importance de la peine susceptible d'être prononcée. Dans ce cas la composition du TM avec magistrat unique prévue par le projet de loi ne serait plus valable. Donc, devant toutes ces ambiguïtés et même ces contradictions, on peut s'interroger sur la possibilité actuelle de procéder au Jugement des infractions maritimes dans l'application stricte des textes existants et ce ne sont certainement pas des capitaines de navires à la formation juridique limitée qui pourront apporter une réponse qu'ils espèrent vivement recevoir de la part de légistes qualifiés. |