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Nouvelles, lettres et extraits, janvier - mars 2019
Recueillies par le Cdt B. Apperry


Application du code ISM


       Avis d'Yves VANDENBORN (P&I The Standard Club) sur l'application du code ISM aujourd'hui. Un article récemment paru dans SAFETY4SEA en juillet 2018 puis dans REPORT (Déc 2018), magazine de l'International Institute of Marine Surveying distribué « on line » à plus de 1 000 experts maritimes nous interpelle. (Ref : 20 years of the ISM code so what next ?)
Malgré une petite erreur d'édition (un mot manque, je pense, mais cela change complètement le sens d'une phrase sur la responsabilité de la DPA) j'ai écrit à notre collègue à ce sujet mais sans réponse, le reste de l'article est intéressant et fait les propositions suivantes : Conclusion je suggère d'appuyer, si nous le pouvons, toute tentative d'amendement au code ISM à l'OMI dans le sens proposé par notre collègue.

                                      

Des réformes importantes sur STCW sont demandées à l'OMI


       A l'ICS, on plaide pour une revue décennale de STCW afin d'adapter les formations minima des marins aux changements rapides de notre métier (IA, navires autonomes, changement de carburant et diminution de la pollution etc.) et réformer une «white list» des formations nationales qui, finalement, accepte tout le monde. Nous sommes aujourd'hui près de 2 millions de marins dans le monde avec un code vieux de près de 25 ans, les amendements de Manille (ou STCW 2010) n'ayant apporté que des adaptations mineures sans une vraie révision en profondeur pour une préparation à opérer les navires du futur.
Il est vrai que les employeurs de main d'œuvre maritime doivent toujours organiser des compléments à STCW et ceci a toujours étonné les armateurs (c'était une des questions que mon dernier armateur posait régulièrement à l'administrateur local. Le président de l'ICS plaide donc pour une nouvelle structure plus flexible pour une adaptation plus rapide à la marine du futur et notamment en insistant sur une approche plus modulaire encore mieux adaptée aux fonctions à bord et aux compétences aujourd'hui requises. 2020 pourrait être une bonne année pour ce grand lessivage mais comme tout cela reste entre les mains des membres de l'OMI et que certains pays renâclent toujours pour de nombreuses raisons à améliorer leurs formations nationales, cela ne sera peut-être qu'un objectif.
Pendant ce temps les Européens sont toujours inquiets de la sortie de l'Europe de la Grande-Bretagne et surtout tentent de se préparer à la marine du futur. Le projet «Skillsea» sur 4 ans a été lancé en janvier (SAS février 2019) avec un financement ERASMUS et confié à un consortium avec STC (Rotterdam) comme chef de projet. Une stratégie pour la formation du futur devrait y être proposée, comprenant : Pour le moment, on ne sait pas si l'enseignement maritime français y participe.

                                      

SAS mars 2019 : la question des moyens de sauvetage toujours à l'ordre du jour


       L'homologation du radeau de Viking (ci-dessous) est toujours en cours après des essais en mer avec des creux de 10 m soit bien supérieurs aux 3 m requis.
Ce nouveau moyen lié à l'utilisation de chaussettes semble très séduisant même s'il utilise des chaussettes qui sont, elles, beaucoup plus sujettes au doute. En effet les nombreux accidents en exercice ou les incidents lors d'évacuations réelles (M/V Norman Atlantic) ont fait réfléchir. Ces chaussettes sont en théorie faites pour éviter des accidents traumatiques lors de l'évacuation mais les essais sont souvent assortis de jambes cassées ou hanches twistées avec des membres d'équipage comme cobayes (chez Costa, ces chaussettes sont en principe réservées à l'évacuation de l'équipage tandis que les passagers évacueront par les embarcations. Je connais plusieurs navires où ce serait impossible. Exemple : chaussettes 1600 personnes ou embarcations 600 personnes.
Cependant, tandis qu'on attend les conclusions finales de l'accident cité ci-dessus, même si certains envisagent de revenir aux toboggans, la solution idéale n'existe pas encore et nous sommes en 2019.
 

                                      

SAS mars 2019


       De récentes statistiques sur les disparitions en mer à partir de paquebots ou de ferries ont mis en lumière un phénomène assez méconnu que notre industrie prend enfin en compte. Depuis 2000, 284 personnes sont «tombées à l'eau» sur des navires de croisière et 41 à partir de grands ferries ce qui fait 1,5 personne par mois et seulement 17% sont récupérées.
Bien que ces statistiques émanent de sources d'information pauvres, le problème interpelle. En ne se focalisant pas sur le saut volontaire à l'eau (suicide) ou quasi volontaire (ivresse), l'industrie du transport de passagers travaille sur des solutions possibles comme celles de la détection automatique si un corps passe par-dessus bord. Les responsabilités du MOB tombent encore une fois sur les épaules du capitaine du navire sauf si toutes les mesures préventives ont été prises : hauteur des rambardes sur les ponts extérieurs et espaces entre les barreaux par exemple, détection automatique de saut à la mer réellement opérationnel (caméras et détecteurs). Des normes ISO sont prévues cette année et une vraie culture sécurité est en amélioration continue.

                                      

Une bataille féroce est en cours entre certains ports et les armateurs : le rejet à la mer des eaux de lavage des scrubbers à circuit ouvert.


       Le port de Singapour a été le premier à édicter : interdiction de rejet des résidus de lavage des fumées des navires avec scrubber ouvert à partir de 2020. Les Chinois s'y mettent aussi maintenant ainsi que la Commission européenne aujourd'hui. Le lobbying de la CSA (Clean Shipping Alliance des grands armateurs européens) contre-attaque : rien ne prouve que les eaux de lavage polluent ! Les scrubbers qui enlèvent les Sox et Nox en produisant des nitrates et peut être de l'acide nitrique et/ou sulfurique… ne polluent donc pas la mer ?
Le CSA vient de réagir à une proposition de la Commission européenne qui tout naturellement demande à l'OMI de lancer un programme de restriction sur les rejets des scrubbers au cours du MEPC 44 en mai de cette année.
Il est vrai que pour les armateurs, cela va faire beaucoup après le taux de soufre de 2020. Une frénésie de construction de gros paquebots au fuel lourd s'est emparée des plus grandes compagnies. Il semble qu'il faille faire vite car l'opinion publique - qui fait aussi le gros des troupes des clients potentiels des croisiéristes - va commencer à s'interroger sur leur attitude. Il va falloir réexpliquer la clause du «Grand-père» au passager potentiel. Il n'est pas sûr qu'il comprenne.
A leur décharge, il est vrai que les compagnies pétrolières n'arrivent pas encore à fournir les possibilités de prix et la disponibilité des futurs fuels plus propres. Leur inquiétude est légitime et ce ne sont pas les capitaines qui vont leur jeter la pierre. Le commandant de l'Azura en sait quelque chose.
La conclusion provisoire est donc de continuer à étudier cette pollution nouvelle sans pour autant trop gêner le business et aussi nos ports qui sont comme toujours bien en retard pour s'équiper afin de recevoir les rejets des navires.
Pendant ce temps-là, les constructeurs de moteurs s'activent pour mettre au point leurs gros moteurs marins équipés de SCR (selective catalytic reduction) qui n'est autre que le pot catalytique de nos voitures diesel et qui demande à être installé à la construction dans une machine déjà bien encombrée ou le mètre carré est très très cher.



Encore plus récemment, Carnival qui joue, il est vrai, sa survie, vient de publier les résultats d'une étude qui, à ce qu'il paraît, sont en conformité avec la réglementation actuelle et future. Où sont donc passés les sulfates et acides ?
280 échantillons provenant de 53 scrubbers de paquebots ont été analysés par des laboratoires accrédités. Les rapports des laboratoires ont été analysés par le DNV/GL et comparés aux Directives européennes sur la qualité de l'eau comme références. On respire donc un peu.

                                      

Récemment reconduit après la fin de son mandat actuel (2020), le Secrétaire général de l'OMI M. Kitack Lim plaide pour une refonte des structures de l'OMI, son processus de décision et sur son accessibilité (documentation, échange de vues, transparence.)


       Communiquer au public les positions de certains membres (aux grandes flottes sous immatriculation de convenance) va un peu agiter le microcosme.
D'autre part, M. Kitack Lim a de nouveau exprimé ses inquiétudes sur les délais souvent importants pour obtenir les résultats (ou de l'absence de résultats) sur plus de 50% des enquêtes concernant de graves accidents maritimes de la part des pavillons concernés (y compris les plus importants).
Nommé la personne la plus influente de 2018 du shipping, le Secrétaire général répond que l'OMI est évidemment en première ligne étant donné l'urgence des changements climatiques mais que la sécurité en mer reste l'élément premier de sa raison d'être. Alors pourquoi attend-on toujours le rapport sur le chavirement (mars 2017) du «Stellar Daisy» avec la perte de 22 marins, navire pourtant sous pavillon des Îles Marshall. Malgré tout ce qui a été fait lors du VIMSAS, on attend aussi le rapport sur l'explosion de deux tankers LPG dans le détroit de Kerch avec au moins 14 marins disparus.
Tout ceci nous rappelle que le chapitre de la SOLAS traitant des responsabilités des enquêtes nautiques résiste aux demandes de modification depuis longtemps. Certains pavillons et non des moindres verraient bien l'OMI devenir l'Enquêteur avec un grand E. En effet, depuis la formation au code ISM et aux certifications, on a pris l'habitude de se baser sur l'indépendance des auditeurs, gage de "résultats les plus près possible de la réalité" d'un côté, avec partage équitable des responsabilités et surtout sur la publication des recommandations issues du retour d'expérience.
Rappelons-nous la méfiance de Carnival propriétaire du Costa Concordia vis-à-vis du Bureau enquête-accident italien et qui a finalement accepté que l'enquête soit diligentée par des militaires (Italiens).
Tout cela tombe sous le sens commun mais pas le sens politique. Ce n'est pas aux capitaines qu'il faut expliquer que parfois le rôle de bouc émissaire est semble-t-il indispensable au politiquement correct.

Si généralement les marins sont complètement d'accord sur l'absence criante d'une division "Enquêtes accidents maritimes" à l'OMI, l'introduction d'un amendement au chapitre correspondant de la SOLAS n'est certainement pas pour tout de suite.
M. Kitack Lim a mérité sa nomination lorsqu'il a résisté au lobbying «fuel lourd pas cher». Ce serait dommage de ne pas bénéficier de son énergie pour cet autre challenge.

                                      

Il y a longtemps que les marins sont conscients que les bruits générés par les navires ne sont pas très bons pour leurs oreilles, ni pour celles des animaux marins d'ailleurs.


       Les marins ont souvent des problèmes d'oreilles causés par leur vie professionnelle passée dans le bruit. Les mécaniciens les premiers, et c'est assez compréhensible malgré des efforts faits depuis de longues années dans le port des casques ou autres protections.
On apprend maintenant qu'on se préoccupe de l'effet nocif des bruits des navires sur les mammifères marins avec, bien évidemment l'intention de réduire ces bruits. Les solutions ne sont pas légion sauf à essayer de faire en sorte que les navires et les cétacés ne se croisent pas, ce qui est déjà tenté.
Il reste aussi la réduction de vitesse ou encore les navires à voiles.
La solution idéale n'existe pas encore et ce ne sont pas les Japonais qui vont nous contredire suite à l'accident récent d'un HSC qui filait à 40 nds : 80 blessés et des dégâts matériels importants.

                                      

Naufrage du Grande America


       Le 12 mars, le "conro" de Grimaldi a coulé à 180 milles dans l'ouest de La Rochelle, apparemment suite à un incendie ayant commencé dans un conteneur, donc un "risque marchandise" pour l'assureur.
Cela commence à faire beaucoup après le dernier incendie catastrophique sur Maersk Honam. Même si le Grande America est italien, le conteneur à l'origine de l'incendie ne l'est pas obligatoirement, et on se tourne bien sûr vers le chargeur qui peut être à la recherche du prix le plus bas comme d'habitude.
Fausses déclarations pour "payer moins cher que moins cher" et transporter quand même les dangereux semble devenu fréquent.
On a récupéré l'équipage, c'est bien, mais le navire est au fond et bien au fond avec son HFO qui va parsemer les plages de l'ouest de billes bien noires cet été.
Les assureurs sont naturellement inquiets. Mathématiquement, si l'on continue à faire confiance aux chargeurs pour les porte-conteneurs de 20 000 TEU et autres, on court vers une belle catastrophe financière et surtout environnementale. Il faudrait peut-être que les assureurs songent à ne pas payer en cas de fraude avérée, en oubliant un peu la concurrence effrénée, ennemie connue de la qualité, comme chacun sait.
 


                                      



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